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50 ans du Hip Hop 🎂

50 ans du hip-hop : les origines d’un mouvement planétaire

DJ Kool Herc et les 50 ans du hip-hop

L’année 2023 célèbre les 50 ans de la culture hip-hop : pour l’occasion, retour sur les origines de ce mouvement devenu planétaire.

De nos jours, le rap a tellement évolué et pris le dessus sur les autres disciplines du hip-hop qu’on en oublierait presque qu’il est issu d’un mouvement plus global. C’est pourtant vrai ! Pour les plus jeunes d’entre vous, et comme le rappelle la Fonky Family dans son classique « Art de Rue », sachez que ce courant culturel né dans la rue se compose historiquement de cinq piliers : le Rap bien sûr (MCing), mais aussi le DJing, le Graffiti, le Breakdance et enfin le Beatbox. Il est aussi régi par une seule devise, un mantra bien connu qui dit : « Peace, Love, Unity & Having Fun ».

Pour comprendre comment tout a commencé, il est important de mettre un peu de contexte dans tout ça. Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, les Américains entrent dans les « Trente Glorieuses ». Ainsi, durant les années 1950 et 1960, une majorité blanche profite du rêve américain tandis que les minorités noires et hispaniques voient leurs conditions de vie se dégrader. Les grands leaders de mouvements identitaires tels que Martin Luther King et Malcom X disparaissent et ces communautés opprimées finissent fatalement par se replier sur elles-mêmes. Résultat, des ghettos se forment dans les grandes villes, New-York en tête et les gangs prennent une place de plus en plus importante dans la société. L’insécurité, la délinquance et la drogue font alors partie du quotidien.

Dans le même temps, la musique noire américaine affirme son identité et le funk et la soul deviennent des modes d’expression et de revendication privilégiés. James Brown, The Last Poets, Sly and the Family Stone, Gil Scott Heron ou Stevie Wonder seront les pionniers de ces genres musicaux légendaires et sur lesquels le hip-hop bâtira ses fondations.

La naissance du Hip-Hop

Nous sommes donc en 1973, à New-York dans un South Bronx défavorisé. Pour palier à la morosité d’un quotidien gangréné par la précarité, les tensions sociales, raciales et politiques de l’époque, la population urbaine désabusée va tout mettre en oeuvre pour sortir la tête de l’eau. L’un des premiers à agir pour remonter le moral des troupes n’est autre que DJ Kool Herc, de son vrai nom Clive Campbell. Ce DJ immigré de Jamaïque et tout juste installé à New-York va avoir une idée de génie : il va organiser des soirées en bas de son domicile, situé au 1520 Sedgwick Avenue. Ce sont les premières block parties de l’Histoire. C’est peut-être un détail pour vous, mais pour les historiens du hip-hop, ça veut dire beaucoup. En effet, c’est à partir de ce moment qu’ils délimitent la naissance du mouvement.

Maintenant, vous vous demandez peut-être à quoi ressemblaient les soirées de DJ Kool Herc. Et bien pour faire simple, pendant qu’il enchaînait les break beats à l’infini, les danseurs nommés b-boys eux se déchaînaient sur scène et laissaient libre cours à leur créativité. En s’inspirant du style rythmé et parfois acrobatique de James Brown, les différents crews se lançaient des défis. Des challenges qui, mis ensemble, ont permis l’élaboration de chorégraphies toujours plus impressionnantes et des figures plus innovantes. A noter que le crew le plus célèbre de cette époque reste incontestablement le Rock Steady Crew.

Des premières blocks parties à la consécration

Au fil des éditions, les block parties de Kool Herc prennent de l’ampleur et gagnent rapidement en popularité. Ainsi, dans une logique de rassemblement, le DJ va inviter tour à tour un représentant de chaque quartier et lui demander d’animer la soirée. Progressivement, les MC, masters of ceremony viennent ajouter un peu de rimes et de rythme à la fête, jusqu’à ce que de véritables joutes verbales s’organisent entre les participants. La formule est toute trouvée et en quelques mois à peine, la fièvre des block parties va envahir tout New-York, du South Bronx au Queens en passant par Harlem, Brooklyn et tous les autres quartiers de la Grosse Pomme en devenir.

Dans le même temps, Grandmaster Flash, un autre DJ du Bronx développe de nouvelles techniques de mix. Doué d’une grande dextérité et d’une rapidité hors normes aux platines, c’est à lui qu’on doit certaines techniques historiques du DJing comme le cutting. Quand bien même, Grand Wizzard Theodore est reconnu comme celui qui a accidentellement inventé le scratch, c’est bien Flash qui le perfectionnera en transformant la gaffe en véritable instrument rythmique. C’est grâce à lui que le scratch deviendra l’un des traits distinctifs de la musique hip-hop.

Toujours dans le Bronx, Afrika Bambaataa, un ancien chef de gang va fonder la Bronx River Organization (une organisation qui deviendra la Zulu Nation le dans le but d’aider les enfants des ghettos à sortir de la spirale de la violence et de la délinquance. Pour y parvenir, il va chercher à canaliser leur agressivité dans une démarche positive de création artistique. C’est aussi à lui qu’on doit la célèbre devise « Peace, Love, Unity and Having fun ». Parallèlement, à tout ça, la pratique du graffiti urbain s’est propagée aux États-Unis puis partout en Europe.

Fort de l’engouement offert par l’action des différents pionniers du hip-hop, le mouvement et sa musique vont progressivement se démocratiser dans tout New-York, et notamment dès 1978, dans les clubs de Manhattan. L’année suivante, en 1979, le premier disque officiel de rap va sortir sur la face B d’un maxi 45T du groupe funk Fatback : King Tim 3 (Personnality Jock). C’est aussi cette année-là que The Sugarhill Gang va signer le premier gros tube de rap de l’Histoire, « Rapper’s Delight ».

A sa sortie, le titre connaît un succès international. Écoulé à plus de 10 millions d’exemplaires, il se classe à l’époque 36e du Billboard Hot 100 et 3e du UK Singles Chart. Le morceau a tellement marqué les esprits que le magazine musical Rolling Stone l’a inclus dans sa liste des « 500 plus grandes chansons de tous les temps ». A noter également que le morceau figure au Registre national des enregistrements de la Bibliothèque du Congrès américain et est introduit au Grammy Hall of Fame en 2014. 

Tout ceux-ci ne sont finalement que les premières pièces d’un mouvement devenu planétaire. Après avoir contaminé New-York, la culture hip-hop se répand partout aux Etats-Unis au cours des années 1980 et 1990. L’engouement autour du mouvement est tel qu’il atteint instantanément les frontières du monde entier, particulièrement l’Europe et la France. Vous comprenez maintenant pourquoi le rap est naturellement devenu la musique la plus écoutée au monde ?

Pour aller plus loin : la BD Hip Hop Family Three

Ne vous y trompez pas, ces quelques paragraphes ne sont qu’un bref résumé de l’éclosion de la culture hip-hop. Si vous souhaitez néanmoins en savoir plus sur les tenants et aboutissants du développement de ce mouvement, nous ne pouvons que vous conseiller la formidable bande-dessinée Hip-Hop Family Three, écrite par Ed Piskor et publiée chez nous aux éditions Papa Guede.

Elue « BD la plus cool de l’univers par ceux qui s’y connaissent », cette bande dessinée intemporelle, drôle et joliment illustrée retrace en détails les débuts de l’histoire du hip-hop et de ses pionniers. Elle se compose de quatre volumes. Le premier dresse le tableau de la naissance de cette culture dans les années 1970 jusqu’en 1981, le second déroule jusqu’en 1983 lorsque le hip-hop part à la conquête des clubs et autres disquaires. Le troisième volet nous replonge dans les années 1983-84, à une époque où la télévision américaine commence à s’intéresser au phénomène. Enfin, le quatrième et dernier tome déroule jusqu’à la fin de l’année de 1985, de l’avènement de Dr. Dre à l’incursion de Run-DMC au cinéma, en passant par la montée en puissance du label Def Jam, la rencontre historique entre Will Smith et Jazzy Jeff ou encore la naissance du premier groupe féminin de rap.

Bref, au cas où vous ne l’auriez pas encore compris, cette série de BD richement illustrée et documentée est un must have pour tous les passionnés de rap et hip-hop dignes de ce nom. Non-contente d’avoir été sélectionnée au Festival d’Angoulême en 2017, l’œuvre d’Ed Piskor a également obtenu un Eisner Award en 2015 dans la catégorie « meilleure série inspirée de la réalité ». En d’autres termes, vous êtes en présence de la référence littéraire ultime pour tout connaître sur les balbutiements de la riche et passionnante histoire du hip-hop. Une histoire qui après déjà cinquante ans d’existence n’a assurément pas fini de s’écrire.

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