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50 ans du Hip Hop 🎂

Le récit mythique de la rivalité East Coast / West Coast

2Pac & Biggie, les maryrs de la rivalité east coast / west coast

Pour célébrer les 50 ans du hip-hop, on revient sur l’une des périodes les plus marquantes de son histoire : la rivalité east coast / west coast.

Tout le monde connaît la devise historique du hip-hop, ce fameux mantra qui dit : « Peace, Love, Unity & Having Fun ». Notre culture désormais cinquantenaire a beau avoir posé ses fondations sur des bases saines et pleines de promesses, cette ambiance bon enfant n’a malheureusement pas duré. En effet, entre 1991 et 1997, le mouvement a été marqué par un épisode aussi tragique qu’historique. Vous l’avez deviné, on parle bien sûr de la fameuse rivalité East Coast / West Coast, autrement dit, les tensions qui ont opposé les rappeurs issus de la côte ouest des États-Unis à ceux de la côte est.

Un peu de contexte pour commencer : entre les années 70 et la fin des années 80, le hip-hop et le rap se développent à vitesse grand V dans tous les quartiers de New-York. L’effervescence est telle qu’aucune autre ville des US n’arrive encore à suivre la cadence. Les choses vont changer à partir du début des 80’s lorsque la Californie et avec elle toute la côte ouest des Etats-Unis va entrer dans le game. Too $hort, Ice-T, Capitan Rapp, King Tee, Toddy Tee et Mix Master Spade ou encore C.I.A sont les premiers artistes west coast à se faire un nom, mais c’est réellement avec l’explosion du groupe NWA que celle-ci va réellement commencer à faire de l’ombre aux groupes et MC’s new-yorkais.

East Coast / West Coast : c’est la guerre !

Évidemment, les pionniers de l’Est voient d’un plutôt mauvais œil que les gars de l’ouest et leur vibe G-Funk viennent manger des parts de plus en plus grosses de leur gâteau. Et c’est ainsi qu’en 1991, le rappeur Tim Dog met le feu aux poudres avec son album Penicillin’ On Wax. Celui-ci n’y va pas par quatre-chemins : avec des titres comme « Fuck Compton ou encore « Step to Me », il s’en prend violemment aux cadres de NWA que sont Eazy-E, Dr. Dre, Ice Cube, MC Eiht. Il n’en faudra pas plus pour lancer la machine infernale et entrer dans l’un des conflits les plus marquants de l’Histoire du rap.

Et encore, ce n’était que l’apéritif puisqu’ensuite, les choses vont s’envenimer. Si les artistes de chacun des camps ne manqueront pas une occasion de se tailler les uns les autres, les choses vont se cristalliser avec une guerre ouverte entre les deux plus gros labels de chaque camps : Death Row Records de Suge Knight à l’Ouest (TupacDaz DillingerKurupt Snoop Dogg, The Outlawz, Dr. Dre et NWA) et Bad Boy Records, l’écurie de Puff Daddy à l’Est (The Notorious B.I.G., Boys N Da Hood, Faith Evans, G-Dep, 112 et Craig Mack).

Ainsi, pendant plus de cinq ans, les deux camps se sont livré une bataille acharnée sur le plan musical, en n’hésitant pas à utiliser la violence verbale pour décrédibiliser et carrément humilier ses adversaires. Parmi les plus beaux clashs de Death Row, on trouve incontestablement « Hit ‘Em Up« . Dans ce classique de la West CoastTupac et son groupe attaque frontalement tout le label Bad Boy Records et les cadres de la East Coast. Puff DaddyBiggieMobb DeepLil Kim, Chino XL ou encore Junior M.A.F.I.A, tout le monde y passe. Shakur prétend même avoir couché avec Faith Evans, la femme de Biggie à l’époque.

Autre titre mémorable de ce conflit côté ouest : le morceau « New York New York » de Tha Dogg Pound sorti en 1995. Sans parler des paroles toujours aussi violentes, c’est surtout son clip qui va exciter les foules. On y voit le crew détruire la ville de New-York façon Godzilla, ni plus ni moins. Le message est clair : les Californiens affichent leur supériorité sur les New-Yorkais. C’en est largement trop pour Mobb Deep qui ne manquera pas de répondre en miroir à leurs ennemis avec le titre « L.AL.A », tourné non pas à la Cité des Anges, mais également dans les rues de la Grosse Pomme.

La tension monte et les rivalités vont devenir de plus en plus violentes entre les rappeurs de l’est et de l’ouest. Et finalement, ce qui devait arriver arriva : dans la mesure où les mots ne suffisent plus à exprimer leur haine, voilà que les balles textuelles ont été remplacées par des balles réelles.

La rivalité jusqu’au sang

Nous sommes en 1994 et Tupac se voit accusé d’agressions sexuelles. Le 30 novembre de cette même année, il est en route pour les Quad Studios de Manhattan où il doit enregistrer un couplet avec Little Shawn pour l’aider à payer ses frais d’avocat. À son arrivée, des membres de Junior M.A.F.I.A., un groupe affilié à Bad Boy, viennent saluer 2Pac dans la rue en contrebas. Sauf qu’une fois que le Californien et son équipe sont entrés au studio, ils sont attaqués par deux hommes armés. Pac, ayant hésité à se mettre à terre à la première sommation de ses agresseurs se retrouve perforé de cinq balles.

Évacué sur une civière, mais bien vivant, il n’a pas manqué de faire un gros f*ck aux membres de Bad Boy présents sur les lieux au moment de l’attaque. En interview ou en musique, Tupac n’hésitera d’ailleurs pas à accuser directement les hommes de P. Diddy comme étant le responsable de cette fusillade. Des charges immédiatement réfutées par le boss du label new-yorkais, qui est même allé l’assurer en personne à Makaveli alors que ce dernier était incarcéré à la prison de Rikers Island, la plus grande maison d’arrêt de la ville et la deuxième plus importante des États-Unis.

Après ça, la guerre entre l’est et l’ouest entre dans son apogée, enen témoigne par la suite la soirée des Source Awards de 1995. Et quand bien même il n’a jamais été acté que les cadres de Bad Boy Records furent responsable de cette première tentative de meurtre, Tupac se fait tirer dessus dans les rues de Las Vegas le 7 septembre 1995 avant d’être déclaré mort six jours plus tard, le 13 septembre 1996. Là encore, si la lumière n’a toujours pas été faite de nos jours sur cette affaire, les soupçons se portent immédiatement sur les chevaliers de la east coast. De quoi exacerber encore plus les rivalités et la haine viscérale entre les deux camps.

Néanmoins, aussi bien à l’est qu’à l’ouest, tout le monde est traumatisé par la mort de Tupac et sa disparition commence à faire germer des perspectives de paix dans les esprits : « et si nous étions allés trop loin ? Ne serait-il pas temps de faire la paix et de revenir aux fondements bienveillants du hip-hop » ? C’est dans ce contexte qu’en février 1997, Snoop Dogg et Puff Daddy tiennent conjointement une conférence de presse durant laquelle ils appellent à une trève durable : « Les enfants du monde entier regardent. En appelant à une trêve, nous leur donnons une raison de vivre », a déclaré l’auteur de Doggystyle.

Le discours d’intention est fort, mais malheureusement pas suffisant pour arrêter la violence puisque moins d’un mois plus tard, le 9 mars 1997, c’est Biggie qui sera à son tour assassiné alors qu’il s’arrêtait à un feu rouge à Los Angeles. Quelques semaines passent et le 3 avril 1997, le gratin de l’industrie du rap et des artistes tels que Snoop Dogg, Tha Dogg Pound, Ice Cube, Bone Thugs-n-Harmony et Fat Joe sont convoqués par le chef religieux américain Louis Farrakhan pour tenter de mettre un terme définitif à ce conflit. La réconciliation est finalement actée et la rivalité East Coast / West Coast va progressivement s’estomper au point de n’être aujourd’hui plus qu’un mauvais souvenir. Un mauvais souvenir, mais surtout, un moment mythique de l’histoire du hip-hop qui a élevé les martyrs Tupac et Biggie en légendes immortelles de cette culture.

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